L’A.N.I. du 26 novembre 2020 en 10 points
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- Les documents support du télétravail
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- Le point sur les arrêtés pris sur le télétravail à fin 2016
- Le plan national de déploiement du télétravail
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- Enjeux et perspectives de l’encadrement d’équipes en télétravail
- Synthèse de la journée d’étude « Télétravail et travail à distance » – 29 mars 2018 – Paris – Espace Haussman Saint-Lazare
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- Le télétravail en période de crise majeure – Partie 2 : 10 points pour envisager un passage opérationnel (et rapide) en télétravail
- Publication du décret du 5 mai 2020 : enfin une vision rénovée du télétravail pour le secteur public ! Analyse et commentaires …
- L’A.N.I. du 26 novembre 2020 en 10 points
- Le télétravail dans le rapport du GIEC
- Le rapport TERRA NOVA sur le télétravail d’octobre 2022
- Quel profil du télétravailleur en 2021 ? Note de la DGAFP sur le télétravail – Nov. 2022
L’Accord National Interprofessionnel du 26 novembre 2020 est un texte de 19 pages qui renouvelle et complète le cadre juridique existant sur le télétravail. Le préambule rappelle le contexte de signature de ce nouvel accord : la crise pandémique qui a démarré en 2020 a considérablement développé une forme de télétravail « exceptionnel » dont les conditions de déploiement diffèrent considérablement du télétravail « habituel ». C’est dans ce contexte que les partenaires sociaux ont mené, de juin à septembre 2020, un travail de diagnostic approfondi pour répertorier les enseignements à tirer de la première période de confinement qui a donné lieu à un recours très important à une forme de télétravail et identifier les enjeux et questions qui se posent dans la perspective d’un développement potentiellement plus important du télétravail dans le cadre de l’activité « normale » de l’entreprise, ou en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure. Focus en dix points principaux sur cet accord.
1 – La réaffirmation des trois grands principes
L’accord réaffirme d’abord les trois grands principes de déploiement :
- Le double volontariat nécessaire du salarié et de l’organisation dans des situations normales de télétravail (en situation de crise, l’employeur peut décider unilatéralement de ce mode d’organisation);
- Le principe de réversibilité qui permet de revenir à une situation de travail au bureau à temps complet sous réserve que le télétravail n’ait pas été prévu dans les conditions d’embauche.
- Le principe d’égalité : la télétravailleur a les mêmes droits légaux et conventionnels que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise.
2 – Les modalités de déploiement
Le télétravail est mis en place dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, dans le cadre d’une charte élaborée par l’employeur après avis du comité social et économique, s’il existe. En l’absence d’accord collectif ou de charte, la mise en place du télétravail est possible par accord de gré à gré entre le salarié et l’employeur. Les partenaires sociaux soulignent cependant l’importance de recourir à un document écrit permettant d’établir la preuve de cet accord. Les organisations signataires soulignent également l’intérêt de prévoir un protocole de fonctionnement en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure, ce qui était rarement inclus dans les accords cadre jusqu’à maintenant.
L’accord collectif applicable ou, à défaut, la charte élaborée par l’employeur précise :
- Les conditions de passage en télétravail, en particulier en cas d’épisode de pollution mentionné à l’article L. 223-1 du code de l’environnement, et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail ;
- Les modalités d’acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
- Les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
- La détermination des plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail ;
- Les modalités d’accès des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail, en application des mesures prévues à l’article L. 5213-6.
3 – Télétravail et handicap
La pratique du télétravail peut être utilisée comme un outil de prévention de la désinsertion professionnelle pour les salariés en situation de handicap ou atteints d’une maladie chronique évolutive ou invalidante (pouvant notamment nécessiter un temps partiel thérapeutique), ou dans le cadre du maintien en emploi. Elle reste cependant également soumise au principe de double volontariat. Dans ce cas, l’organisation du travail peut être adaptée, et des aménagements de poste apportés, avec, le cas échéant, le concours des services de santé au travail.
4 – Télétravail et égalité hommes / femmes
Le télétravail ne doit pas être un frein au respect de l’égalité entre les femmes et les hommes. L’employeur s’assure de l’égalité d’accès au télétravail entre les femmes et les hommes. C’est une des conditions de réussite de sa mise en œuvre.
La pratique du télétravail ne peut influencer négativement sur la carrière des femmes et des hommes. L’éloignement physique du salarié en télétravail des centres de décision ou du manager ne doit pas conduire à une exclusion des politiques de promotion interne et de revalorisation salariale.
5 – La durée du temps de travail, les temps de repos et le contrôle du télétravailleur
Le recours au télétravail n’affecte pas la qualité de salarié du salarié en télétravail et ne remet pas en cause le lien de subordination contractuel entre l’employeur et les salariés s’agissant de l’exécution du travail. La durée du travail du salarié est donc identique qu’il soit sur site ou en télétravail. Les dispositions notamment relatives à la durée maximale quotidienne, aux durées maximales hebdomadaires, au temps de repos, au temps de pause et au décompte des heures de travail s’appliquent ainsi que celles concernant les salariés sous convention de forfait jours.
Les dispositions du code du travail imposent à l’employeur de contrôler la durée du travail du salarié.
L’employeur fixe, en concertation avec le salarié, les plages horaires durant lesquelles il peut le contacter, en cohérence avec les horaires de travail en vigueur dans l’entreprise.
Il résulte des dispositions légales que si un moyen de contrôle de l’activité du salarié et de contrôle du temps de travail est mis en place, il doit être justifié par la nature de la tâche à accomplir et proportionné au but recherché, et le salarié doit en être informé. La mise en place de dispositifs numériques spécifiques nécessite le respect de deux conditions cumulatives : la consultation préalable du CSE et l’information préalable des salariés.
La mise en place du télétravail prend en compte le droit à la déconnexion, lequel doit faire l’objet d’un accord ou d’une charte traitant de ses modalités de mise en œuvre, dans les conditions prévues par les dispositions du code du travail relatives à la négociation obligatoire en entreprise. Le droit à la déconnexion a pour objectif le respect des temps de repos et de congé ainsi que la vie personnelle et familiale du salarié. C’est le droit pour tout salarié de ne pas être connecté à un outil numérique professionnel en dehors de son temps de travail.
L’employeur organise chaque année un entretien qui porte notamment sur les conditions d’activité et la charge de travail du salarié en télétravail.
6 – La prévention des risques du télétravail
6.1 – Evaluation et informations sur les risques professionnels
Les signataires soulignent l’importance de la prise en compte du télétravail dans la démarche d’analyse de risque visée à l’article L 4121-1 du code du travail et qui fait l’objet d’une transcription dans le document unique d’évaluation des risques.
Le télétravail est une modalité d’organisation du travail qui peut faire l’objet d’une évaluation des risques professionnels adaptée. Cette évaluation des risques peut notamment intégrer les risques liés à l’éloignement du salarié de la communauté de travail et à la régulation de l’usage des outils numériques.
L’employeur informe le salarié en télétravail de la politique de l’entreprise en matière de santé et de sécurité au travail, en particulier, des règles relatives à l’utilisation des écrans de visualisation et de recommandations en matière d’ergonomie. Le salarié en télétravail est tenu de respecter et d’appliquer correctement ces règles de prévention et de sécurité.
6.2 – La prévention de l’isolement
Le diagnostic paritaire partagé du 22 septembre 2020 a souligné les risques d’isolement en télétravail et de perte du lien vis-à-vis de la communauté de travail. Une attention particulière doit être portée non seulement aux salariés en télétravail, mais également à ceux qui travaillent sur site, notamment en cas de recours au télétravail en raison de circonstances exceptionnelles ou de force majeure.
L’éloignement des collaborateurs et la distanciation physique des équipes de travail du fait du télétravail ne doit pas conduire à un amoindrissement du lien social. Des dispositifs ad hoc mobilisant tous les acteurs de l’entreprise peuvent être élaborés et mis en œuvre dans l’entreprise pour garantir le maintien du lien social. Cela participe de la responsabilité sociétale de l’entreprise.
La prévention de l’isolement participe à la fois de la santé au travail du salarié en télétravail et du maintien du sentiment d’appartenance à l’entreprise. Des règles de fonctionnement communes intégrant des repères relatifs aux activités, aux responsabilités individuelles et collectives, à la marge de manœuvre et à l’autonomie de chacun des salariés en télétravail, aux interlocuteurs et personnes ressources et aux modalités de leur interpellation sont autant de garants face au risque d’isolement. Les temps de travail collectif réguliers sont indispensables.
Le salarié en télétravail doit pouvoir alerter son manager de son éventuel sentiment d’isolement, afin que ce dernier puisse proposer des solutions pour y remédier. A cet égard, il peut notamment être utile de mettre à disposition des salariés en télétravail les coordonnées des services en charge des ressources humaines dans l’entreprise, des services de santé au travail, etc.
7 – La prise en charge des frais professionnels
Le principe selon lequel les frais engagés par un salarié dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail doivent être supportés par l’employeur s’applique à l’ensemble des situations de travail. A ce titre, il appartient ainsi à l’entreprise de prendre en charge les dépenses qui sont engagées par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’entreprise, après validation de l’employeur.
Le choix des modalités de prise en charge éventuelle des frais professionnels peut être, le cas échéant, un sujet de dialogue social au sein de l’entreprise.
L’allocation forfaitaire versée, le cas échéant, par l’employeur pour rembourser ce dernier est réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et contributions sociales dans la limite des seuils prévus par la loi.
8 – La protection des données professionnelles
Qu’il s’agisse d’outils fournis par l’employeur ou d’outils personnels du salarié, l’usage des outils numériques est encadré par l’employeur, auquel il incombe de prendre, dans le respect du Règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles (RGPD) et des prescriptions de la CNIL, les mesures nécessaires pour assurer la protection des données personnelles du salarié en télétravail et celles traitées par ce dernier à des fins professionnelles. L’employeur informe le salarié en télétravail des dispositions légales et des règles propres à l’entreprise relatives à la protection de ces données et à leur confidentialité. Il l’informe également de toute restriction de l’usage des équipements ou outils informatiques et des sanctions en cas de non-respect des règles applicables. Il incombe au salarié en télétravail de se conformer à ces règles. Néanmoins, dès lors que le salarié utilise un outil personnel, ces restrictions ne concernent que leur usage à des fins professionnelles. L’accord souligne l’intérêt des bonnes pratiques suivantes, s’agissant de l’usage des outils numériques et de la protection des données :
- possibilité d’établir un socle de consignes minimales à respecter en télétravail, et communiquer ce document à l’ensemble des salariés ;
- mise à disposition éventuelle des salariés une liste d’outils de communication et de travail collaboratif appropriés au travail à distance, qui garantissent la confidentialité des échanges et des données partagées ;
- possibilité de mise en place de protocoles garantissant la confidentialité et l’authentification du serveur destinataire.
9 – L’évolution et l’adaptation des pratiques professionnelles
Le télétravail s’exerce dans le cadre normal de la relation contractuelle de travail. Néanmoins, mis en place de manière régulière, il fait évoluer la manière d’animer la communauté de travail et peut donc s’accompagner de la mise en place de pratiques managériales spécifiques.
L’ANI du 28 février 2020 portant diverses orientations pour les cadres aborde déjà les enjeux nouveaux liés au management à distance en référence notamment au télétravail et « appelle à une forme de renouveau des pratiques managériales qui parviendrait à concilier la multiplicité des organisations de travail (en fonction des projets et des enjeux notamment), la mobilisation des nouveaux outils numériques, et les bénéfices que représentent les liens humains avec le collectif de travail, tant en termes de performance que d’épanouissement personnel et professionnel. »
« Ces nouvelles pratiques managériales impliquent de nouvelles responsabilités partagées entre l’employeur et le salarié cadre, dans une recherche de performance collective et d’excellence opérationnelle, en veillant à respecter l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle… »
Il en ressort que le télétravail repose sur un postulat fondamental – la relation de confiance entre un responsable et chaque salarié en télétravail – et deux aptitudes complémentaires – l’autonomie et la responsabilité nécessaires au télétravail.
Les pratiques managériales sont ainsi réinterrogées et adaptées en fonction de ce socle, ainsi que des objectifs du télétravail et de l’organisation de celui-ci : elles diffèreront notamment en fonction du nombre de personnes en télétravail ou de la fréquence de ce dernier. La mise en œuvre réussie du télétravail se traduit par des règles d’organisation claires afin d’assurer le bon fonctionnement de la communauté de travail et de fixer un cadre au sein duquel les collaborateurs peuvent évoluer de la manière la plus autonome possible.
Le manager, accompagné par sa hiérarchie, a un rôle clé dans la mise en œuvre opérationnelle du télétravail, notamment parce qu’il assure ou participe à la fixation des objectifs du salarié. Il favorise ainsi le dialogue professionnel sur les pratiques de télétravail et sur l’articulation entre le télétravail et le travail sur site pour chacun des salariés et au sein des communautés de travail. Il est également un des garants du maintien du lien social entre le salarié en télétravail et l’entreprise.
Au-delà d’une relation de confiance entre le manager et les salariés nécessaire à la mise en place du télétravail, la définition d’objectifs clairs peut faciliter le management à distance. Il est alors possible de se concentrer sur la résolution des dysfonctionnements éventuels, et d’évaluer plus facilement la bonne répartition de la charge de travail et la bonne réalisation des missions. Cela peut permettre une plus grande délégation de responsabilité et une autonomie plus importante octroyée au salarié.
10 – La formation, un point central pour garantir une introduction réussie
Les salariés en télétravail doivent recevoir régulièrement une formation appropriée, ciblée sur les équipements techniques à leur disposition et sur les caractéristiques de cette forme d’organisation du travail. Les responsables hiérarchiques et les collègues directs des salariés en télétravail doivent également pouvoir bénéficier d’une formation à cette forme de travail et à sa gestion.
Les outils de communication évoluent avec le télétravail, les modes de communication doivent donc également s’adapter. L’absence de communication non-verbale dans les échanges à distance est prise en compte et les modes et canaux de communication doivent être adaptés aux messages.
La montée en compétences des managers et des salariés aux évolutions managériales et d’organisation du travail engendrées par le télétravail est un moyen d’en assurer une mise en place réussie. Des formations peuvent notamment être proposés sur les thématiques suivantes :
- l’adaptation des modalités de réalisation de l’activité,
- l’autonomie du salarié en télétravail, le séquençage de la journée de télétravail,
- le respect du cadre légal relatif à la durée du travail et à la déconnexion,
- l’utilisation régulée des outils numériques et collaboratifs.
- Enfin, les compétences numériques des managers et collaborateurs sont essentielles dans la pratique du télétravail : d’une part pour veiller à l’appropriation des outils de travail à distance mais également à la sécurisation des données de l’entreprise. Une formation à ces outils, ainsi qu’à la cybersécurité, peut être nécessaire en amont de toute mise en place du télétravail et peut se faire en mobilisant le CLéA numérique.
Des guides pratiques peuvent également être mis à disposition pour accompagner les managers et salariés dans la mise en place du télétravail. En outre, il est recommandé que les managers soient, dès leur prise de poste, formés aux modalités du management à distance et à la prise en compte des particularités de l’hybridation de l’organisation du travail : articulation et concomitance entre télétravail et travail sur site. Le CLéA Manager, dont la création a été acté par l’ANI du 28 février 2020 portant diverses orientations pour les cadres, pourra utilement être mobilisé.
L’accord a été signé par la CFDT, CFE-CGC, FO d’une part, et le MEDEF, la CPME et U2P d’autre part.