Le télétravail en période de crise majeure – Partie 1:Quel cadre juridique pour déployer le télétravail en période de crise sanitaire ?
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En 2009, c’est déjà la crise pandémique aviaire (H1N1) qui avait poussé beaucoup d’entreprises publiques et privées à se poser la question de leur capacité réelle à assurer la continuité de leur activité en cas de crise pandémique. En 2020, la France connaît donc un nouvel épisode sur une telle crise. Quel est donc aujourd’hui le cadre juridique existant en France pour déployer le télétravail en période crise majeure ?
Le cadre juridique du télétravail en cas de crise majeure
Le cadre juridique de déploiement du télétravail pour le public ou pour le privé n’est pas le même. Un point commun cependant, la crise pandémique étant comprise comme un cas de force majeure, l’employeur a la possibilité d’obliger ses salariés à exercer en télétravail depuis leur domicile. Une obligation qui reste cependant théorique car elle reste conditionnée à la capacité de l’entreprise de déployer, en urgence, des outils et des méthodes compatibles avec le télétravail.
Si un accord collectif existe déjà, la situation sera plus simple. Vous avez déjà définis des modalités de déploiement (lieu(x) de télétravail, horaires, conditions d’assurance, sécurité des installations électriques, …) : le déploiement en période de crise majeure visera à reconfigurer ses règles en définissant les nouvelles modalités de déploiement (à temps plein pour certains salariés, en temps alterné pour ceux qui seront en obligation d’assurer une présence physique sur site). L’existence d’un accord collectif indique également que vous vous êtes déjà questionnés sur les aspects techniques (équipement fournis, conditions d’accès sécurisé au réseau professionnel, logiciels opérationnels à distance, …), ce qui permettra sans doute aussi de faciliter un déploiement rapide.
Si vous ne disposez pas encore d’un accord collectif, il s’agira de définir une contractualisation minimum, permettant de couvrir la responsabilité de l’employeur et du télétravailleur et de définir des conditions dérogatoires du droit commun, permettant un télétravail à temps complet ou alterné (Voir la partie 2 de cet article présentant 10 points pour envisager un passage opérationnel en télétravail).
Mais que disent les textes sur le déploiement en cas de crise majeure ?
En 2008-2009, la crise de grippe A avait déjà mis le télétravail sous le feu de l’actualité et d’ailleurs contribué à une augmentation très forte des accords de télétravail dans les années qui ont suivis. Depuis, le cadre juridique a été complété par plusieurs textes sur la base de dispositions qui restent différentes entre les secteur public et privé.
Dispositions de télétravail en cas de crise majeure pour le secteur privé
Le cadre juridique pour le secteur privé est défini par l’arrêté national interprofessionnel de juillet 2005, par la loi Warsmann de Mars 2012 et par les ordonnances de 2017 (dites ordonnances Macron). Ce cadre est complété par un éventuel accord cadre que votre entreprise peut avoir signé sur le télétravail et qui va préciser les conditions de déploiement pour votre entreprise. La loi Warsmann avait créé trois nouveaux articles du code du Travail (articles L. 1222-9 à L. 1222-11). L’article L. 1222-11 indique ainsi que « En cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés ». Jusqu’à l’année 2017, le télétravail dans le secteur privé devait être mis en place sur un formalisme à peu près similaire au secteur public, par le bais d’un accord collectif (ou charte de télétravail) et d’une convention individuelle définissant des conditions de déploiement au poste.
L’article 21-III de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 prévoit « en l’absence de charte ou d’accord collectif, lorsque le salarié et l’employeur conviennent de recourir de manière occasionnelle au télétravail, ils formalisent leur accord par tout moyen ». Cela permet donc de déployer le télétravail avec un mode de contractualisation s’appuyant sur un simple document écrit, signé par le salarié concerné et par son employeur.
Pour le secteur privé, le télétravail peut donc être déployé rapidement mais en définissant des conditions qui permettent de couvrir les questions de responsabilité de l’employeur, en cas d’accident du travail par exemple (lieu ou le télétravail va s’exercer et horaires).
Références pour le secteur privé :
Dispositions de télétravail en cas de crise majeure pour le secteur public
Le cadre juridique pour le secteur public est défini par la loi Sauvadet du 12 mars 2012 et par son décret d’application, publié le 11 février 2016. Les conditions fixées par ce cadre réglementaire sont ensuite déclinées dans un accord collectif de télétravail qui peut prendre la forme, par exemple, d’un arrêté ou d’une délibération mais être aussi complétée par un accord ou une charte spécifique de télétravail pour définir les conditions opérationnelles de déploiement. Ce document collectif est complété par un arrêté individuel autorisant l’agent à télétravailler, qu’il est généralement conseillé de compléter par une convention individuel constituant un contrat entre l’agent et son employeur public, définissant les conditions spécifiques de déploiement au poste (ex. : formule de télétravail, jours choisis, horaires, …) mais présentant aussi des règles de fonctionnement propres au service de rattachement.
En cas de crise majeure, il est possible de proposer prioritairement le télétravail sous des formes dérogatoires du droit commun (jusqu’à un plein temps) et une pour une durée qui est dans ce cas définie par l’employeur. Généralement, il est conseillé de prévoir, dans l’accord collectif, les conditions de recours à cette disposition.
A noter que l’article 4 du décret du 11 février permet de proposer des conditions d’accès au télétravail dérogatoires du droit commun, pour raisons médicales, qui peuvent être proposés sur avis médical sur une période de six mois, renouvelable une fois (soit un total de douze mois). En cas de crise majeure, on pourrait imaginer que le télétravail soit proposé aux personnes ayant des problèmes spécifiques et préalables de santé pour couvrir une période un peu plus longue que celle de la crise sanitaire (NB : même si le temps plein en télétravail serait théoriquement possible, cela pose bien sûr d’autres questions liées à la personne concerné d’abord et à l’organisation de son poste ensuite).
Pour le secteur public, le télétravail nécessite en théorie plus de préparation que dans le secteur privé mais peut cependant aussi être mis en œuvre de manière dérogatoire en cas de crise majeure. A noter qu’un projet de décret a été présenté en groupe de travail à la DGAFP en décembre dernier, voté à l’unanimité par ce groupe le 29 janvier 2020 et devrait être publié d’ici à avril 2020. Ce décret devrait apporter une plus grande souplesse dans le déploiement du télétravail pour le secteur public en ajoutant deux points au cadre actuel :
- Suppression de la notion de régularité sur la base de jours de télétravail fixes par semaine et en proposant de nouvelles formules, déjà utilisées dans de nombreuses organisations publiques, sur la base de forfaits de télétravail mensualisés ou annualisés.
- La notion d’acte autorisant le télétravail serait remplacé par un document, permettant une contractualisation plus souple sans doute sur le modèle du secteur privé.
Ce futur décret prévoyait également deux points spécifiques sur la gestion de crise en télétravail :
- Possibilité de déroger, à l’initiative de l’employeur, à la “règle de présence minimale sur site en cas d’événements temporaires qui perturbent l’accès au site de travail ou le travail sur site”.
- Possibilité d’autoriser l’utilisation du matériel personnel pour permettre une meilleure réactivité face à des événements soudains.
Si le décret est publié, ces mesures pourraient permettre une plus grande souplesse pour gérer la fin de crise. NB : la question de l’utilisation du matériel personnel peut cependant interroger sur les questions de sécurité mais ce sera à l’employeur de poser des règles sur ce point.
Références pour le secteur public :
La difficulté d’organiser le télétravail à temps plein
Hors période de crise, on conseille généralement de ne pas dépasser un quota de deux jours fixes de télétravail par semaine. Au-delà, le télétravail est plus complexe et le risque est plus fort de ressentir de l’isolement et une forme d’usure professionnelle. La question se pose bien sûr en des termes différents dans la période actuelle, mais elle doit rester à l’esprit des employeurs pour définir un nouveau rythme de travail en période de crise.
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